L’Ombudsman constate que l’Ontario n’a pas tenu sa promesse envers les victimes d’actes criminels, et que le ministère du Procureur général enfreint la loi
février 27, 2007
27 février 2007
Le système d’indemnisation des victimes d’actes criminels en Ontario fait du mal aux gens qu’il est censé aider. C’est ce que déclare l’ombudsman André Marin dans son rapport qu’il a rendu public aujourd’hui, L’art de faire double injure.
TORONTO (le 27 février 2007) – Le système d’indemnisation des victimes d’actes criminels en Ontario fait du mal aux gens qu’il est censé aider. C’est ce que déclare l’ombudsman André Marin dans son rapport qu’il a rendu public aujourd’hui, L’art de faire double injure.
Les gouvernements qui se sont succédé ont ignoré leurs propres lois et sont restés tout simplement immobiles alors que la Commission d’indemnisation des victimes d’actes criminels contraignait les victimes à passer dans un dédale effrayant de bureaucratie. Telle a été la conclusion de l’enquête de M. Marin. Le rapport raconte en détail les épreuves vécues par différentes victimes alors qu’elles se battaient avec un système « obsédé par les règlements, par la paperasserie » où il faut en moyenne trois ans pour traiter une demande.
Bien que la Commission ait de graves problèmes systémiques qui ne dépendent que d’elle, la responsabilité première de cet « échec colossal » revient au gouvernement de l’Ontario, a dit M. Marin, « car il a mis en place, par l’entremise du ministère du Procureur général, une culture qui n’est aucunement faite pour appuyer la Commission d’indemnisation des victimes d’actes criminels, et car il a fait des promesses en vertu de la Loi sur l’indemnisation des victimes d’actes criminels qui n’ont pas été tenues ». Il a ajouté : « Le ministère du Procureur général enfreint la loi et agit à l’encontre de l’autonomie de la Commission en limitant les fonds alloués à la Commission pour financer les indemnités qu’elle accorde. »
La Commission est contrainte d’indemniser les victimes à partir de son propre budget, qui n’a pas été ajusté en fonction d’une augmentation marquée des demandes. Par conséquent, elle a dû favoriser le retardement et l’attrition comme une tactique de survie face à d’intenses pressions budgétaires, a constaté M. Marin.
L’enquête de M. Marin, menée par l’Équipe d’intervention spéciale de l’ombudsman (EISO), a été déclenchée à la suite d’une recrudescence des plaintes déposées au bureau de l’ombudsman par les victimes d’actes criminels. Ces victimes avaient le sentiment d’être revictimisées par le traitement impersonnel et trop zélé que leur faisait subir la Commission ainsi que par les arriérés écrasants de dossiers – problèmes bien connus des gouvernements récents, a déclaré M. Marin.
Mais les gouvernements n’ont pas pu, ou n’ont pas voulu agir et « ils ont choisi de regarder les yeux grand fermés alors que la Commission d’indemnisation des victimes d’actes criminels dépérissait pour devenir l’institution caduque qu’elle est actuellement », a dit M. Marin. « Les gouvernements, y compris le gouvernement actuel, ont préféré recourir à la stratégie de retardement la plus ancienne dans l’administration – prétendre agir, mais s’en tenir à étudier les choses éternellement.
L’Équipe d’enquête de l’ombudsman a examiné des documents gouvernementaux remontant à plus d’une décennie qui proposaient de nombreuses réformes de la Commission d’indemnisation des victimes d’actes criminels – qui ont toutes menées nulle part. Le rapport de M. Marin passe en revue ces plans qui ont connu l’échec et fait 17 recommandations d’action immédiate.
Sa recommandation clé est que le ministère du Procureur général fournisse immédiatement à la Commission d’indemnisation des victimes d’actes criminels les fonds nécessaires pour qu’elle tienne ses promesses envers les Ontariens et les Ontariennes. Bien qu’il ne conseille pas le gouvernement quant au financement, M. Marin souligne que le Fonds de la justice pour les victimes, qui se chiffre à plusieurs millions de dollars, « reste en grande partie inutilisé alors que les victimes de crimes violents en Ontario continuent de souffrir des insuffisances budgétaires de la Commission ».
M. Marin préconise aussi à la Commission de « remplacer une culture de survie par une culture de soutien et de compassion » en renonçant à « son fétichisme des documents officiels » et à sa tendance à traiter les victimes comme de simples dossiers, et non comme des gens qui souffrent et qui ont besoin d’aide, pour faire place à une touche plus humaine. À cette fin, il recommande la création d’un groupe consultatif composé de victimes de la criminalité et de leurs défenseurs, pour guider cette réforme.
Sur réception du rapport préliminaire de l’ombudsman, un peu plus tôt ce mois-ci, le ministère du Procureur général a accepté d’en appliquer toutes les recommandations et il s’est engagé à mettre un plan en place d’ici le 15 août. En contraste, la réponse initiale de la Commission a montré qu’elle « n’y comprenait vraiment rien », a dit M. Marin. Elle n’a pas reconnu la nécessité de réformer ses pratiques. Toutefois, depuis la parution du rapport final de l’ombudsman, la Commission semble avoir accepté toutes ses recommandations. Elle a promis un « plan d’action détaillé » d’ici le 31 mars.
Soulignant qu’il croit à l’honnêteté de cette « seconde réaction plus objective » de la Commission, M. Marin a déclaré qu’il surveillerait de près les efforts faits par la Commission et par le Ministère pour s’assurer qu’un échéancier clair d’action est mis en place. « À moins d’une vraie vague de changements dans le traitement des victimes, je crains qu’elles soient de nouveau laissées pour compte, contraintes de passer à travers les rouages d’une bureaucratie qui nie la situation », a-t-il déclaré.
L’art de faire double injure est le septième rapport d’enquête publié par une Équipe d’intervention spéciale de l’ombudsman depuis que M. Marin est entré en fonction au printemps 2005. Les enquêtes précédentes de l’EISO ont mené à des réformes à la Société d’évaluation foncière des municipalités, au Bureau des obligations familiales ainsi qu’aux services pour les enfants handicapés et pour les enfants ayant des besoins particuliers, de même que dans le dépistage des maladies génétiques chez les nouveau-nés.